(Tiré de Duché d'Aarkonie)
I. Introduction
Où que les Croisés soient, ils combattent le Fléau et les Réprouvés, tout en offrant l'hospitalité aux survivants qu'ils rencontrent sur ces terres dévastées. Par un truchement malheureux du hasard, les Croisés tendent à considérer comme suspecte toute personne n'appartenant pas à leur Ordre. Ainsi, les réfugiés les rencontrant finissent tués bien plus fréquemment qu'aidés, et finissent classés comme dommage collatéral supportable par les Croisés.
Tout mort-vivant est un rival pour la Croisade. Le Fléau et les Réprouvés doivent être chassés, selon les Croisés, avant que le pays puisse retrouver la vie. Les Croisés se considèrent comme alliés avec l'Eglise de la Sainte Lumière et les dirigeants de l'Alliance, mais leurs alliés se défendent immanquablement, refusant d'être trop rapprochés de la Croisade et allant même jusqu'à conseiller aux voyageurs de se tenir largement à l'écart de toute tâche écarlate visible dans la grisaille des Maleterres...
II. Historique de la Croisade Écarlate
L'un des fondateurs de la Croisade, Sire Isillien, suivait les préceptes de la Sainte Lumière pendant des années, au sein de l'Eglise de Lordaeron. Là, il servait fréquemment de contact entre les religieux et les Paladins de l'Ordre de la Main Argentée. C'est ainsi qu'il fut amené à rencontrer le second fondateur de la Croisade, le Général Abbendis. Ensemble, ils travaillaient de concert, enseignant les préceptes de la Lumière à de jeunes paladins. Lorsque le Fléau frappa Lordaeron, tous ceux le pouvant encore durent fuir devant les masses indomptables des morts-vivants. Bien qu'il ne faille voir aucun déshonneur dans cette défaite, ni même dans cette fuite, tous les écrits de l'époque rapportent que Isillien comme Abbendis ne purent pas se pardonner pareil échec. En quelques jours, leur raison d'être, leurs enseignements, leurs vies entières venaient d'être ravagées.
Unissant leurs forces et leur rage, Abbendis et Isillien ne baissèrent pas les bras et écumèrent le nord de Lordaeron. Combattant sans repos le Fléau, ils détruisirent autant de morts-vivants qu'ils le purent, sans jamais – cependant – sembler comprendre que lutter à une telle échelle pouvait être dérisoire. D'ailleurs, peut-être que cela ne le fut pas. Parmi ces terres souillées par la Peste, leur colère inextinguible trouva souvent de l'écho dans le coeur de ceux qui avaient perdu des êtres chers avec l'arrivée du Fléau. Bientôt, de nombreux gens, guerriers, paladins, ou même simples gens, se regroupèrent à leur suite. Ces premières recrues avaient souvent vu leur famille tomber sous les coups du Fléau, trop souvent pour les retrouver combattant aux côtés de leurs assassins quelques jours plus tard...
Parmi eux se trouve celui qui put leur donner des moyens: Taerlan Fordring, ancien élève d'Isillien, et Paladin de la Main Argentée comme son père – le Noble Tirion – avant lui. A la Croisade embryonnaire, il offrit ses terres et le château construit dessus. Ainsi, la forteresse d'Hearthglen, située au Nord des Maleterres de l'Ouest, devint la première base d'opération de la communauté. Rapidement, Isillien devint le prosélyte de la Croisade en devenir. Son fanatisme, compréhensible à l'époque, attirait bien plus de gens qu'il n'en faisait rire ou fuir. D'ailleurs... Qui aurait pu s'opposer à lui en argumentant que le Fléau n'était pas maléfique?
Cependant, aussi habile que soit Isillien, quelques recrues ont jugé sage de quitter les troupes peu de temps après. Le jeune page du Prêtre fut retrouvé, la dague personnelle d'Isillien plantée en plein coeur. Loin de nier les faits, l'homme expliqua que son page avait été tué durant un combat commun, durant l'après-midi. Selon le récit d'Isillien, les morts-vivants donnèrent une seconde naissance au page, et l'envoyèrent quelques heures plus tard en tant qu'assassin. Les propos d'Isillien furent si persuasifs que nombreux sont ceux qui nourrirent de folles craintes au sein de la Croisade... Si le Fléau pouvait relever aussi vite les corps, si vite que les cadavres conservaient les couleurs et l'aspect de la vie, comment faire pour reconnaître les vivants des non-vivants ?
Cette terreur donna naissance à la première mise en quarantaine connue par les Croisés. Cinq cycles plus tard, les Croisés furent décrétés lavés de tout soupçon et purs de toute souillure du Fléau; Isillien et Abbendis conclurent qu'ils avaient désormais de bonnes racines à l'Ouest. Il leur fallait désormais frapper le Fléau là où il était le plus fort: dans les Maleterres de l'Est.
Isillien prit le titre de Grand Inquisiteur de la Croisade tandis que Abbendis menait l'essentiel des forces armées vers l'Est, à Main de Tyr. Dans leurs préparatifs avant de frapper Stratholme, la Croisade Écarlate recruta encore et encore. Elle détruisit toute trace du Fléau ou des Réprouvés, ou du moins tout ceux croisant la route de ses combattants. De nombreux civils fuyant cette région perdue tombèrent aussi sous leurs coups furieux, mais comme le stipula le Grand Inquisiteur dans l'une de ses correspondances avec l'Aube d'Argent: « On est jamais trop prudent. »
III. Organisation de la Croisade Écarlate
La Croisade Écarlate est avant toute chose une communauté menée d'une manière militaire. Les deux fondateurs se considèrent mutuellement comme le Coeur – Isillien – et le bras – Abbendis – de la Croisade, et leur autorité est aussi incontestée qu'incontestable. Le second mène l'ensemble des opérations militaires à l'Est, tandis que le premier dirige et enseigne les Inquisiteurs à l'Ouest tout en s'occupant des interrogatoires où vivants comme non-vivants sont priés de livrer des renseignements sur les agissements du Fléau. A l'Est, le rôle d'Inquisition revient néanmoins souvent à Abbendis, tout comme Isillien contrôle les combattants présents à l'Ouest par l'intermédiaire de son loyal élève: Taerlan.
La Croisade est composée de treize généraux commandant les officiers et les troupes: Deux milles hommes basés à Hearthglen, et dix mille à Main de Tyr. Ces généraux sont sélectionnés autant pour leur indéniable capacité à commander que pour leur dévotion sans faille envers la Croisade et ses maîtres. Quant aux troupes, il n'est pas rare que les recrues ayant déjà combattu le Fléau avant de rejoindre la Croisade se voient très vite promues. L'Inquisition ne comprenant pas qu'il puisse y avoir une seule voix qui s'élève contre les objectifs de la Croisade – l'éradication du Fléau – tout désaccord est considéré comme prenant sa source dans une infiltration des non-vivants. Les dissidents sont donc reconnus comme impurs, et sont traités avec la démesure que cela implique. De fait, s'il existe des Croisés n'appréciant pas les méthodes de leurs supérieurs, ces doutes ne nous parviennent pas: car ces gens, s'ils existent, se taisent et obéissent dès lors plus par peur que par réelle conviction.
IV. Des méthodes condamnées par l'Alliance ?
La question brûle souvent les lèvres, et les affirmations des Croisés prétendant être au sein de l'Alliance n'ont d'autre effet qu'attiser le malaise de tout le monde. L'Alliance connaît actuellement un nombre de conflits bien supérieur à ce que ses capacités peuvent endiguer. Ceux vivant loin de Stormwind se retrouvent sans grand soutien, et voient leurs terres volées et ravagées par le Fléau et les soi-disant Réprouvés. Pour ceux là, l'élimination du Fléau est une priorité absolue. Bien que les forces de la Croisade Ecarlate soient actuellement dérisoires, elles restent les seules à mener actuellement le combat. A bien des yeux, les pertes collatérales causées par le fanatisme sont un prix acceptable. Pourtant, comme les premières lignes de cet article le laissent entendre, dans les hautes sphères de l'Alliance, la Croisade est considérée comme anathème. Quoiqu'en disent certains, très rares sont ceux qui - parmi les autorités de l'Alliance - ne condamnent pas les actions de la Croisade.
Ainsi, non, l'Alliance n'approuve pas les méthodes et les actes de la Croisade. Cependant, la Croisade Ecarlate peut être actuellement comparée à une tâche de sang sur l'habit de quelqu'un dont la demeure est en feu. Tant que les véritables problèmes assaillant l'Alliance ne seront pas résolus, la Croisade ne verra pas ses actions être jugulées.
IV. Des méthodes condamnées par l'Alliance ?
Les défenseurs de la Croisade Écarlate ne manquent jamais une seule occasion de mettre en avant leur lutte. Cette fameuse lutte qu'ils mènent avec une dévotion indéniable, et qui leur fourni immanquablement l'absolution lors d'erreurs de jugement. Ne convient-il pas de porter un regard autrement plus critique sur la situation des Maleterres ?
La Croisade Ecarlate comporte, nous l'avons dit, une douzaine de milliers d'hommes et de femmes. Ils sont majoritairement bien équipés, et bien entraînés. Face à eux se dresse Stratholme, Undercity, Brill, Andoral... Au bas mot, cent mille âmes damnées, avec parmi elles des forces qu'un mortel ne peut appréhender... Sans même compter les forces résidant en Northend. Aussi, seul un fanatique peut croire que la cause de la Croisade peut parvenir à arracher plus qu'un rictus d'amusement sur les traits de Kel'Thuzad. Il y a fort à parier que si Main de Tyr existe encore, c'est uniquement car le Seigneur de Stratholme n'y voit là qu'un insecte qu'il pourra écraser à sa guise... Ou, pire pour les Croisés, qu'il ne voit en eux qu'un moyen commode d'éprouver ses nouvelles magies, maléfices et stratèges...
Seule, la Croisade est pour ainsi dire pathétique d'impuissance et peut-être est-ce un manque de discernement qui lui insuffle de s'opposer ainsi à Stratholme. La Croisade devrait être incorporée dans une armée de plus grande échelle si elle désire avoir la moindre chance de réellement menacer le Fléau. Mais peut-être faudrait-il que les autorités de la Croisade réalisent la futilité de leur combat isolé. Et les propos rapportés par Brann Bronzebeard laissent songeurs face à l'excès de confiance du Généralissime...
Aparté:
Extrait d'une conversation consignée par le sage Brann Bronzebeard, après sa rencontre avec le Général Abbendis:
- « Soyez sans crainte, Nain! La Sainte Lumière elle-même nous a béni, et nous triompherons! Donnez nous... deux ans. Dans deux ans, si les Humains n'ont pas récupéré tout Lordaeron, je vous offre une pinte de bière. Que dîtes-vous de ça, Nain? »
- « Je n'aurais jamais ma bière. Mais bonne chance, Général. »